Compositeur, chef d’orchestre et saxophoniste, Shabaka Hutchings a passé les 10 dernières années avec ses orchestres actifs Sons of Kemet, The Comet Is Coming et Shabaka and the Ancestors Together, ils se sont imposés comme l’avant-garde d’une nouvelle scène de jazz britannique et ont réussi. une fusion attractive en son sein. Avec des rythmes inspirés du jazz, des Afrobeats, des rythmes caribéens et de la scène électronique londonienne. Jusqu’à ce qu’il abandonne complètement le groove et le saxophone pour se concentrer sur l’étude et la maîtrise d’autres instruments à vent, en particulier le shakuhachi, une flûte à cinq trous d’origine japonaise. Le regrettez-vous? « Rien », nous a assuré le musicien lors d’un concert à Gez samedi.
On se souvient encore du concert donné par Sons of Kemet dans le cadre du Festival international de jazz de Montréal en 2018. Les musiciens ont fait vibrer les murs du Studio TD alors qu’ils se produisaient devant un public enthousiaste avec beaucoup de compétence et d’énergie.
A en juger par la composition méditative de l’album Perceive its Beauty, Reconnaître sa grâce, sorti en avril dernier (et son préambule, le mini-album African Culture, 2022), lors des deux concerts ce sera une toute autre histoire. Hutchings sera accompagné de trois collègues forts : le batteur Austin Williamson, la harpiste Brandi Younger et le bassiste Junius Paul. Ces deux derniers se joindront sans doute ce soir à l’orchestre du batteur Makaya McCraven sur la scène du Théâtre Duceppe.
Si les aventures précédentes dans Sons of Kemet et Comet Comet avaient promu en rythme un message militant (féministe, anticolonial, droits civiques), Hutch Su estime que son nouveau projet se tourne également vers notre époque. Du point de vue de l’atmosphère, c’est un voyage vers un état musical plus apaisé, un état dont nous avons réalisé qu’il était important à mesure que nous sortons de la pandémie. Il s’agit de souligner l’importance de prendre du recul et de l’introspection. Eh bien, ce disque est un peu une réponse à ce que nous avons vécu ces dernières années – enfin, peut-être pas une réponse, mais un acolyte. »
Sur scène, Shabaka transporte une partie de sa collection de flûtes, avec en son centre un shakuhachi. « Mais permettez-moi d’ajouter une nuance : même si j’ai arrêté de jouer du saxophone, je joue toujours de la clarinette. » C’est un instrument à anche unique semblable au saxophone. « Je n’ai pas arrêté de jouer du saxophone parce que je sentais avoir atteint les limites de ce que je pouvais réaliser au saxophone, parce que le saxophone est avant tout une question d’inspiration, et peu importe l’instrument dont on joue, Parce qu’au fond de moi, je Je crois qu’il n’y a pas de fin au saxophone », explique Shabaka-Hutchings.
« Bien sûr, je joue du saxophone depuis si longtemps que je suis meilleur que la flûte. Je pourrais continuer à jouer, mais si j’abandonnais, je devrais consacrer toute mon énergie à m’améliorer. la flûte. Il n’y a pas de secret. C’est la seule façon de maîtriser ces instruments.
Sa formation en musique classique lui a inculqué la discipline nécessaire pour y parvenir. Il m’a fallu un an pour extraire du shakuhachi le son que j’avais dans ma tête. Il faudrait six ou sept représentations supplémentaires pour atteindre le niveau d’interprétation du répertoire traditionnel japonais.
Repenser ce qu’est le jazz
« Il me serait facile de poursuivre ma carrière de saxophoniste si je savais toujours exactement ce que je devrais faire. Mais sans ce sentiment de sécurité, je suis obligé de me demander ce que je devrais faire à la place. Ce point d’interrogation devient une étincelle pour ma créativité. Je m’efforce d’être instinctif plutôt que méthodique. »
Contrairement au saxophone, le shakuhachi n’est pas un instrument de jazz traditionnel. Le jouer le fera-t-il reconsidérer ce qu’est la musique jazz ? « Hmm, » pensa-t-il avant de répondre. Je le crois. Je viens de finir d’écrire ma biographie. [du légendaire saxophoniste ténor] En lisant Sonny Rollins et son approche du jazz, j’ai réalisé que pour lui, le jazz était un mode de vie et que nous devrions en apprendre le plus possible sur la musique. »
« Apprendre ce qu’est la musique peut vous aider à éviter que votre carrière ne suive une trajectoire prédéterminée », poursuit Shabaka. […] Pour moi, j’apprends la musique en lisant ce que mes héros ont à dire sur la musique. A partir de ces lectures, tenter de définir ce qu’est le jazz en expliquant ses instruments, ses rythmes, ou la manière dont les notes sont construites dans cet esprit conduit toujours à une autre perspective contradictoire, j’ai appris qu’il existe. Il est donc important pour moi de pouvoir exprimer l’étendue de notre vision de la musique et de montrer comment cette vision est liée à la tradition, au génie et à la souffrance des musiciens qui m’ont précédé. faire. Le jazz n’est donc pas associé aux instruments, mais à l’histoire et aux relations entre les choses. »
Après avoir expérimenté un quatuor (flûte, basse, batterie et trompette d’Ambrose Akinmusire) et un travail de création à New York, Shabaka a expérimenté la formule en trio (flûte, harpe, batterie), et à chaque performance, il continue d’écrire le sien. propre histoire du jazz), il revient à Montréal avec un nouveau quatuor.
« Au début de cette année, j’ai abordé le concert dans la perspective d’une improvisation complète, mais plus je me produisais sur scène, plus je devenais fasciné par la mélodie qui constitue la base de l’improvisation. Cependant, la mélodie joue toujours un rôle important. rôle dans ce projet. À chaque concert, j’ai découvert que plus j’incorpore la mélodie dans ma performance, mieux je peux créer un cadre narratif à la fois pour le concert et le projet musical. En plus de cela, c’est ce que j’aime le plus dans mon album. c’est sa narration et son flux, et c’est ce que j’essaie de recréer sur scène.»
« Perceive its Beauty, Reconnaître sa grâce » de Shabaka est sorti sur le label Impulse. Shabaka se produira au Gesù samedi à 18h et 22h30.
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